Il y a 26 ans, une immense manifestation d’étudiants chinois, place Tiananmen, était réprimée dans le sang. Chaque année, quelques tentatives de commémoration ont lieu, vite étouffées par le pouvoir qui a toujours nié cet épisode de son histoire. Cette année, de jeunes Chinois qui étudient à l’étranger ont publié une lettre adressée à leurs « camarades étudiant en Chine ».
C’est la première fois que de jeunes Chinois qui n’ont pas connu le massacre de Tiananmen et qui découvrent à l’étranger une autre version de l’histoire, se sentent la responsabilité de transmettre cette vérité à ceux qui sont restés dans le pays.
Pour Marie Holzman, cette lettre montre aussi aux Occidentaux à quel point la mémoire est effacée par les autorités chinoises. « Tous les Chinois qui restent en Chine ne peuvent pas avoir accès à une version réelle de l’histoire de la Chine, explique la sinologue. Ils sont obligés de s’accoutumer à la version officielle, qui est une version de propagande qui transforme la réalité. »
La lettre a brièvement circulé en Chine et ses auteurs ont été accusés de colporter des mensonges occidentaux. « Ils risquent tout, ajoute Marie Holzman. Ils risquent de ne pas pouvoir rentrer en Chine, de provoquer des ennuis à leur famille. Ils risquent d’être ostracisés par les autres étudiants qui eux désirent être bien vus par la cellule du Parti qui se trouve discrètement cachée quelque part au sein des étudiants qui étudient aux Etats-Unis. »
Pour la sinologue, cette lettre est une avancée, mais il faudra encore beaucoup de temps avant que des réformes politiques s’imposent, pour sortir du totalitarisme dans lequel la Chine est en train de replonger.
Contrôle accru des dissidents
En prévision des commémorations du 26ème anniversaire du massacre de Tiananmen, le gouvernement chinois a multiplié comme chaque année les contrôles et la surveillance des dissidents. Selon les informations diffusées sur Internet, ces derniers jours plusieurs dizaines de personnes ont été assignées à résidence ou ont été victimes de disparitions forcées.
Duan Zong Xian, dissident et activiste de la province méridionale de Guang Xi entame, comme chaque année, une grève de la faim avec une dizaine d’autres personnes. Il constate que le nombre de grévistes est plus important que les années précédentes.
« Jusqu’ici, aucun gréviste n’a été arrêté, mais beaucoup ont reçu des appels de la police. Moi-même, j’ai été contacté par le chef de la police locale qui m’a demandé de ne pas diffuser d’informations sur Internet concernant le 4 juin, témoigne le dissident. Bien sûr, j’ai peur pour ma famille, on m’a déjà arrêté à plusieurs reprises, mais généralement on me relâche au bout de quelques jours. »
Il espère qu’à force de persévérance, le régime finira par plier.« De toute façon, nous continueront cette grève de la faim, tous les ans, jusqu’à ce que la Chine devienne un pays démocratique, assure Duan Zong Xian. Je fais la grève de la faim pour trois raisons : pour saluer la mémoire des victimes du massacre de Tiananmen, pour soutenir les dissidents arrêtés ces dernières années, mais aussi pour que les gens sachent enfin la vérité sur ces événements et que l’esprit de Tiananmen ne disparaisse pas. »
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