Suite du procès d’Hissène Habré à Dakar. Les audiences ont repris depuis le début de la semaine et après avoir tenté de cerner la personnalité de l’ancien président tchadien, la Cour essaye maintenant de comprendre quelle était sa part d’implication dans les faits de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et torture qui lui sont reprochés. Ce vendredi matin, c’est une importante personnalité politique tchadienne qui a été appelée à la barre.
L’ancien Premier ministre Jean Alingué, à sa demande et avec l’accord de la Cour, a été flouté par peur de représailles. Devant la Chambre, le témoin n’était visiblement pas à l’aise, sa voix faible, mal assurée, son témoignage a plongé la Cour au cœur du débat fondamental de ce procès : Hissène Habré, s’il n’a pas commis directement d’exaction, était-il le cerveau de la répression ?
Lors de son audition, monsieur Alingué, qui a indiqué que certains de ses proches ont été victimes de la violence, a déclaré que la DDS, la Direction de documentation et de la sécurité, était un instrument de torture et de répression et qu’Hissène Habré, étant le chef du pays, aucune décision ne pouvait se prendre sans son accord.
Au milieu des années 1980, Jean Alingué qui vivait en exil est revenu au Tchad suite à la signature d’un accord et il est devenu président de l’Assemblée nationale. Au moment des questions, l’avocat commis d’office qui défend monsieur Habré s’est engouffré dans cette brèche : « Vous occupiez des fonctions importantes, président de l’Assemblée nationale, quelles étaient vos relations avec monsieur Habré ? Etait-il courtois ? ». « Il y avait de la courtoisie de part et d’autre », répond le témoin. « Avez-vous parlé avec monsieur Habré des choses qui vous préoccupaient ? », demande l’avocat. « Non, je n’en ai pas eu l’occasion, monsieur Habré n’était pas accessible ».
Le président de la Cour enchaîne : « Monsieur Alingué, dans le cadre de vos fonctions officielles, avez-vous entendu monsieur Habré cautionner ou avaliser les massacres ? », « Non, jamais, je ne l’ai entendu. Mais on le comprenait dans les discours de monsieur Habré quand il parlait par exemple de balai d’assainissement qui devait passer, cela était diffusé sur les antennes de la radio ». Le président remercie le témoin et met fin à son audition. Hissène Habré, une fois de plus accusé directement à la barre, n’a pas bougé d’un pouce.
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